Trois communications de Sensei Roland Habersetzer

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1968-2018

… (publié le 22.1.2018)

                  
        Après mes 60 ans de pratique martiale, dont 55 ans d’enseignement du Karatedo, voilà qu’en entrant dans cette nouvelle année je me rappelle comme si c’était hier celle de 1968… Il y a 50 ans, j’entamais résolument une aventure éditoriale dont j’étais bien entendu à mille lieux d’imaginer qu’elle durerait aussi longtemps. J’avais à 28 ans, encore 2ème Dan, une « furieuse » envie de partager ma passion. C’est en découvrant sur les rayons d’une librairie un « Apprenez vous-même le Judo » (Editions Eyrolles) que j’avais de suite pensé que le Karaté pouvait apparaître utilement dans la même collection. Et je me lançais dans une aventure qui a marqué (et pas mal surchargé) ma vie, non sans l’aide précieuse de l’un de mes élèves du dojo que j’avais créé en 1962 au Strasbourg-Etudiant-Club, et qui m’apprit comment développer une pellicule photo et faire des épreuves sur papier (je n’oublierai donc jamais ce que je dois à Daniel Coquery, même si je ne sais plus rien de lui depuis ; car j‘en ai faits, depuis, des centaines et des centaines de tirages pour tant de livres avant l’apparition du numérique, en pensant si souvent à lui…).

        Il en résultat en 1968 cet « Apprenez vous-même le Karaté », mon premier livre. Qui eut de suite un succès que je n’attendais pas. Et qui fut aussitôt à l’origine de l’intérêt de Monsieur Roger Vaultier, fondateur des Editions Amphora, qui me demanda ce que je pensais d’une collection de livres d’arts martiaux à réaliser chez lui… La suite est connue. Dans l’immédiat, et juste pour la petite histoire, des auteurs de BD s’inspirèrent directement de certaines des photos de ce livre (il y avait alors fort peu de documentation sur « l’art de la main vide ». Ainsi ces 2 dessins de Marcello pour son héros « Docteur Justice », où l’on peut faire le jeu des 7 erreurs... Un peu plus tard Edgar Jacobs, père de BD cultes telle la « Marque Jaune », partit également d’autres photos de mon « Guide Marabout du Karaté » pour donner vie à son karatéka dans « Les 3 formules du professeur Sato »… mais ceci est encore une autre histoire).

        Me voici donc, déjà, 50 ans après… un demi-siècle ! Rien que ça… Avec, ces prochains mois, la reprise chez Budo Editions de mon titre « Self-défense », largement revu et augmenté pour l’occasion. 1968-2018 : près d’une centaine d’ouvrages (je ne sais plus exactement, en comptant les reprises et les adaptations, autorisées, en langues étrangères, qui ont tout de même été à chaque fois en grande partie des réécritures et révisions prenant quasi autant de temps qu’une nouvelle création). Peu importe. Ce qui compte est le travail fait : une activité éditoriale qui ne s’est jamais arrêtée à ce jour, et dont les traces sont encore sauvées en une époque où l’accélération de tout rend tout très vite obsolète et force à l’oubli. Et de cela j’avoue que j’en suis heureux aujourd’hui, même si je dois depuis un moment tout compter dans ma vie en demi-siècle de temps passé ! Le prix à payer. Mais il y a quand-même de très beaux anniversaires…
 
 
 
Lorsqu’il faudra « Répondre à l’agression » c’est, à 60%, l’esprit de (et dans) la technique qui fera la différence !

... (publié le 20.6.2018)          


        J’ai profité de la refonte de ce titre, que beaucoup d’anciens pratiquants connaissent sûrement, pour rappeler une vérité trop souvent oubliée. Le retour d’expérience de tous ceux qui sont habilités à en parler (pas forcément ceux qui font le plus parler d’eux), nous apprend en effet que dans toute confrontation réellement « martiale » (= combat de survie), la technique intervient très peu en tant que telle : elle ne représente que 30% de la capacité de réponse à l’attaque (et encore…15% pour ce qui est de la technique en elle-même et 15% pour…la manière adéquate de l’utiliser !). Le reste dépend à 60% du mental présent dans l’affrontement ! Et il reste toujours encore (ne jamais l’oublier non plus) 10% laissés à… la chance ! Engagement (du mental), pureté (dans la technique), modestie (dans la réussite) : les valeurs et réserves qu’ont toujours voulu nous faire comprendre les (vrais) maîtres d’arts martiaux du monde entier, anciens comme contemporains.
        On peut se demander à quoi rime cet étalage de gestuelles (voire gesticulations…)  d’apparence martiale, si souvent inutilement excessives et compliquées, détournant de ces 60% qui seront déterminants au moment décisif. Accumuler les techniques sans mettre en avant la priorité d’un mental affuté et prudent créé une dangereuse illusion.
 


« Karaté Wado-ryu »…il y a 50 ans déjà…ET DE DEUX !

... (publié le 30.9.2018)

                            
        A l’automne 1968 paraissait chez Flammarion mon livre « Le Karaté, technique Wado-ryu ».

        Il était le second sur une très longue liste à venir, et que je ne pouvais alors même pas imaginer!  J’y avais consciencieusement dessiné à la petite plume, notamment, les 5 katas de Pin-An, qui furent ainsi et pour la première fois largement portés à la connaissance du grand public. Sans le savoir, j’avais une bonne année d’avance sur d’autres publications, pilotées par la Fédération Française (dont j’étais alors encore un ambassadeur très actif en tant que délégué pour la Ligue de l’Est, Alsace, Lorraine, Vosges, à une époque où je croyais encore que l’on pouvait faire évoluer les choses de l’intérieur, se battre efficacement pour que cette fédération ne privilégie pas le « tout sportif » au détriment du Do du Karaté…). J’avais agi en free-lance, sans aucune aide ni de la fédération ni du monde de l’édition (où je n’avais d’ailleurs aucune relation).

        A ma grande surprise, les premiers milliers d’exemplaires s’envolèrent très rapidement, puis le livre continua à être régulièrement réapprovisionné sur les rayons des librairies pendant une vingtaine d’années. Lorsque sa commercialisation prit fin, on me communiqua un tirage total de près de… 60.000 exemplaires !! Ce qui est proprement incroyable quand on pense à la qualité de l’impression de ce temps  (pauvre qualité d’un papier qui empâtait mes dessins, encore mal aboutis et de surcroît très mal scannés par l’éditeur, quelques photos en noir et blanc, austérité de la présentation). Probablement reste-t-il encore d’anciens karatékas,  pratiquants ou non,  qui ont en ce temps maintenant lointain gagné leurs « Dan » grâce à ce manuel. Ou de plus jeunes karatékas qui l’ont découvert dans la bibliothèque de leur… grand-père ! Il fut, évidemment, immédiatement copié à l’étranger. Début d’une habitude à chacune de mes parutions, toujours guettée jusque loin hors de l’hexagone… Cette publication pionnière sur un style que Hiroo Mochizuki Sensei avait apporté en France, où l’on ne connaissait encore que le Shotokan, et qu’il diffusa en stages enthousiasmants jusqu’à Strasbourg (quels merveilleux souvenirs !), reçut le même accueil que mon « Apprenez-vous-même le Karaté » paru cette même année. Mais je découvris rapidement qu’en m’appuyant sur le circuit des libraires (où tout le monde pouvait librement avoir accès à l’information), et en ne sollicitant pas l’appui du milieu fédéral parisien pour la promotion de mon livre, je ne me faisais pas que des amis…Cela ne me découragea cependant pas de vouloir diffuser le plus possible une pratique qui était en train de changer ma vie, une découverte que je voulais expliquer et partager (en jeune enseignant de métier que j’étais). Ce que je fis encore un an après, avec deux nouveaux manuels qui firent  encore davantage date dans l’histoire du Karaté en France comme dans bien d’autres pays ! Et avant quelques autres qui suivirent rapidement : ils étaient les premiers de tant de petits cailloux semés derrière moi au fur et à mesure que je défrichais la route que j’avais choisie et que je voulais faire découvrir… (voir mes « Mémoires »).

        Un mois après la parution de cet ouvrage que personne n’attendait, et qui fut sans nul doute en France un temps fort du développement de l’art de la main vide (qu’on le reconnaisse ou non aujourd’hui), c’était aussi, déjà, mon 5è Stage d’Hiver de Strasbourg, où cette volonté de partage de ma « certaine idée du Karatedo » s’installait déjà comme une évidence (mais si agaçante pour certains),  jusqu’à devenir cette « tradition qui dure », avec le prochain 55è Kan-geiko, très bientôt (24 et 25 novembre) !

        Historia continua…Encore un demi-siècle plus tard…Mais, certes,  avec quelque évolution dans ma vision d’un art martial encore utile et réellement adapté à notre temps, où les dérives sportives et ludiques explosent dans un bruit assourdissant, au détriment de l’essentiel. Une évolution qui assure la survie de ma passion dans l’hiver de ma vie. J’ai simplement pris, encore une fois et depuis un bon moment, un peu d’avance avec mon concept « Tengu »… Et commence déjà à être, encore une fois, et de manière de plus en plus visible, source d’inspiration ailleurs (ah, ce scanning en Tengu-no-kamae, à la fin de l’engagement, devenu « à la mode ») … Rendez-vous dans…50 ans !!
 

 

  

 

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